L’Afrique du nord

&

L’Afrique Occidentale Française

Période 1940-1943

 

 

Le contexte

La Campagne de France, vient de se terminer.

A minuit, les 22 et 24 juin 1940, les armistices signés avec l’Allemagne et l’Italie mettent un terme aux opérations de guerre. La France est coupée en deux : une zone occupée par les Allemands s étend à l’ouest d’une ligne Saint-Jean Pied de Port/Vierzon, ainsi qu’au  nord d’un axe Vierzon/Lons le Saunier.

Le restant de la métropole dénommée « zone libre » est gouverné par le régime dit de « Vichy ».

Juste avant ces signatures de juin 1940, la Marine profitant de ce créneau a replié le maximum des aéronefs dont elle dispose encore, soit en zone libre (Hyères, Fréjus, Berre), soit en Afrique du Nord.

- Le 3 juillet 1940 une force navale britannique attaque nos cuirassés  amarrés à Mers-El-Kébir.

- Le 23 septembre de la même année, une autre force navale anglaise, se présente devant Dakar et attaque en vain les positions françaises.

Ces 2 actions vont être la principale cause durant plus de 2 ans, de tentatives de représailles sur Gibraltar ainsi qu’au dessus du Sierra Léone ou de la Gambie britannique en Afrique occidentale, ces deux derniers territoires étant sous le contrôle anglais.

Enfin et pour finir d’exacerber les relations entre « Vichy » et la Grande Bretagne, l’affaire de Syrie en juin 1941 viendra couronner le tout : Résolus d’occuper ce protectorat (encore sous mandat français de « Vichy »), les Britanniques et Français libres y pénètrent afin d’empêcher une éventuelle main mise par les Allemands. Vont s’ensuivre de violents combats sur terre, sur mer et dans les airs entre les forces françaises « vichystes » et britanniques (les Français dits « libres » ne seront pas mêlés à ces combats). C’est dans ce contexte que la flottille de bombardement 4F (6B et 7B), accompagnée peu de temps après par l’escadrille de chasse 1AC, vont être amenées à aller combattre en ces lieux de juin à juillet de cette année là et où la flottille de bombardement va subir d’énormes pertes.

Après le débarquement américain de novembre 1942 en Afrique du nord, tout ce que pouvait compter  l’Aéronautique navale à ce moment là en Afrique, va se retrouver dans le camp des Alliés, et grâce à l’obtention de nouveaux appareils cédés par ces derniers, elle va alors participer à leurs côtés aux opérations menées contre les allemands ou  les italiens.

 

Tract de propagande largué par les américains avant  le débarquement de novembre 42.

Présentation des unités

En Afrique du Nord, se trouvent :

- Les 2 escadrilles de chasse 1AC (ex AC1) et 2AC (ex AC2), armées en Dewoitine D.520 et basées tout d’abord sur un ex terrain de l’armée de l’Air, Tafaraoui,  situé à une trentaine de km d’Oran en Algérie, terrain qui prend par la suite de nom de Lartigue-Tafaraoui (du nom du Contre amiral Lartigue, chef du S/C Aéro, tué lors d’un bombardement allemand sur Rochefort le 19 juin 1940). Les 2 formations sont amatelotées et forment la 1ère flottille d’aviation (1F).

- Les escadrilles de bombardement 1B, 2B, 4B, 5B (nouvellement créées), 3B (ex 3B2/B3), 6B (ex AB2) et 7B (ex AB4). Toutes sont armées en  Martin 167F. Au départ, les 1, 2, 3, 4, et 5B sont stationnées sur le terrain de Médiouna (Maroc), tandis que les 6 et 7B se trouvent à Tafaraoui. Par la suite et jusqu’en novembre 1942, ces escadrilles auront d’autres affectations.

Les 1 et 5B sont réunies dans la 2ème flottille d’aviation (2F).

Les 2 et 3B forment ensembles la 3ème flottille d’aviation (3F).

Les 6 et 7B sont dans la 4ème flottille d’aviation (4F).

- Les 2 escadrilles de torpillage 1T et 2T dotées de Latécoère 298 sont groupées dans la 5ème flottille d’aviation (5F).

- Au point de vue Exploration, l’ex E1 devenue 1E, toujours dotée de Breguet Bizerte stationne à Karouba.(Elle sera dissoute le 8-12-1942, lors de l’occupation de la Tunisie par les Allemands).

En métropole sur la base de Berre subsistent 3 escadrilles :

- Une d’exploration, la 9E (ex E9) armée en Breguet-Bizerte, LeO H47 et H246. (Dissoute le 27-11-1942 suite à l’invasion allemande en zone sud de la France).

- Deux de torpillage 3T (ex T3) et 4T (ex T4) dotées de Latécoère 298. Ces 2 escadrilles forment la 6ème flottille  d’aviation (6F). (Cet ensemble sera également dissout le 27-11-1942 lors de l’invasion allemande en zone sud de la France)

A Toulon, les hydravions embarqués à bord des bâtiments de la Force de haute mer, continuent plus ou moins à voler.

Au point de vue du personnel, la formation des techniciens sera assurée par la BAN Berre. A noter qu’une formation de pilotes et de personnels volants sera assumée par Saint Raphaël à compter d’août 1941 et jusqu’en 1942.

A Dakar, l’escadrille d’exploration 4E (ex E4) est armée avec les hydravions Antarès, Altaïr, Achernar et LeO H470. Après le ralliement des forces françaises d’Afrique aux côtés des Alliés, cette escadrille sera transformée sur Sunderland et deviendra flottille 7F.

De Juin 1941 à avril 1943, deux escadrilles de torpillage nouvellement formées (5T et 6T), forment la 7ème flottille d’aviation (7F). Toutes deux sont équipées en Latécoère 298. Cet ensemble sera dissout le 1er avril 1943.

Au Liban, l’ex escadrille 8S4 devenue 19S, est dotée d’hydravions Loire 130. Après avoir lutté contre les Britanniques en juin et juillet 1941, et subit de lourdes pertes, elle sera dissoute en juillet.

Présentation de deux nouveaux types d’appareils

Les escadrilles de bombardement sont armées en Glenn-Martin 167-A3.  Il s’agit d’un bimoteur de construction américaine, commandé par l’Armée de l’Air française début 1940, et dont une soixantaine sont reversés à l’Aéronautique navale juste avant l’armistice.

Motorisé par deux Pratt et Whitney R-1830, cet appareil d’une envergure de 18,70 mètres peut emporter 4 hommes d'équipage et 900 kg de bombes. Sa défense est constituée par 2 mitrailleuses de 7,5 mm situées dans chacune des ailes, deux autres en tourelle sur le dos et une autre sous le fuselage.

Cet aéronef peut franchir 1700 km ; il a un poids à vide de 5 tonnes et atteint une vitesse maxi de 450 km /h.

A titre d’information notons que cet appareil d’origine américaine, ne sera pas utilisé contre les forces de l’Axe, mais bizarrement contre les Alliés (Gibraltar en Juillet 1940, Syrie en 1941 et Maroc en novembre 1942).

Les deux escadrilles de chasse, de leurs côtés sont dotées de Dewoitine 520. Ces appareils ont été versés le 25 mai 1940 à la flottille afin de remplacer les Potez 631. Mais à peine ces derniers arrivent-ils à Cherbourg qu’il leur faut se replier sur Rochefort et ensuite sur Hyères. De cette dernière base, ils franchissent la Méditerranée et vont alors se réfugier en Afrique du Nord.

Le Dewoitine 520 est un monoplan, motorisé par un Hispano-Suiza de 935 cv.  D’une envergure de 10,20 mètres pour une longueur de 8,60, il pèse à vide 2 tonnes. Son armement est constitué par un canon de 20 mm dans l’axe de l’hélice, et deux mitrailleuses de 7,5 mm dans chaque aile. Sa vitesse maximale est de 530 km/heure.

Au même titre que les Martin 167, les Dewoitine 520 de l’Aéronautique navale ne seront utilisés que contre les Alliés…

 

 

 

Petit historique de quelques flottilles

 

La flottille de chasse 1F (escadrilles 1AC et 2AC)

Après avoir perdu 8 membres de son personnel volant lors de la campagne de France, mais en ayant néanmoins 13 avions ennemis abattus (8 homologués) inscrits à son tableau de chasse, la flottille après s’être repliée sur Hyères, part à destination de l’Algérie, se pose à Bône et d’où quelques jours plus tard elle s’envole pour Sidi-Ahmed (Bizerte en Tunisie).

Au sein de la flottille sous les ordres du Capitaine de Corvette JOZAN (ce dernier remplacé en octobre par le Lieutenant de Vaisseau PIREL), l’escadrille 1AC est maintenant commandée par le Lieutenant de Vaisseau CASSE (La 2AC quant à elle, est toujours sous les ordres du LV FOLLIOT et ce jusqu’en décembre date à laquelle il devient le chef de la flottille).

Suite à l’attaque anglaise de juillet 1940 et afin de contrer toute récidive aérienne britannique en provenance de Gibraltar, il est alors décidé de rapprocher la flottille de Mers-El-Kébir (Algérie). A cet effet, dès septembre elle quitte la Tunisie et vient s’installer sur le terrain de Tafaraoui (qui prend le nom de Lartigue un peu plus tard) situé à une trentaine de km de la ville d’Oran.

Le cuirassé PROVENCE, l’un des survivants de la tragédie de Mers-El-Kébir est renvoyé à Toulon en novembre. A cette occasion, la flottille participe à la couverture aérienne dans le ciel oranais, lors de la sortie de ce dernier.

Durant l’année 1941, les Dewoitine 520 de la flottille vont se partager à tour de rôle une présence soit sur le terrain de Lartigue soit sur celui de Sidi-Ahmed.

Notons que l’escadrille 1AC sous le commandement du LV CASSE participe en 1941 à l’affaire de Syrie. Le bilan de cette campagne sera la perte d’un de ses pilotes (SM Ancion) ainsi que 2 de ses appareils, pour  6 victoires aériennes durant la journée du 9 juillet sur les avions Briston Blenheim et Curtiss de la coalition anglo-australienne. Une citation à l’ordre de l’Armée de mer viendra s’ajouter aux 2 autres obtenues lors de la campagne de France.

Le 5 janvier 1942 avec 23 de ses appareils, la flottille participe à l’escorte du bâtiment de ligne DUNKERQUE lors de sa sortie de Mers El Kébir vers Toulon.

Début 1942, des informations au sujet d’une éventuelle invasion du territoire marocain par les armées allemandes transitant par l’Espagne, commencent à circuler ; dans cette éventualité la flottille est affectée en mai à Port-Lyautey (Kenitra) non loin de la ville de Rabat au Maroc. C’est là qu’en août le LV CRAIGNIC prend le commandement de la 1AC, et l’EV1 DU MERLE, celui de la 2AC. Le LV FOLLIOT quant à lui, est toujours à la tête de la flottille, mais il succombera le 8 novembre 1942 lors de l’attaque américaine.

C’est à partir du terrain de Port-Lyautey et ce 8 novembre que la flottille va subir la dite attaque américaine lors du débarquement en Afrique du Nord. (L’attaque aérienne est menée par plus de 170 aéronefs, comprenant des F4F Wildcat, des SBD Dauntless et des Avenger, décollant à partir des 4 porte-avions au sein du Task Group 34).

De nombreux navires de guerre américains ayant été signalés, ordre est donné à la flottille de décoller. Dans un premier temps, une section de Dewoitine fonce sur les chalands de débarquement qui s’approchent des plages et les arrosent à la mitrailleuse ou au canon. A leurs tours ils sont touchés par des impacts de DCA, mais parviennent néanmoins à revenir tant bien que mal  à Port-Lyautey.

Sur ces entrefaites, une formation de F4F Wildcat des porte-avions US, passe à l’attaque au dessus du terrain et mitraillent tous les avions au sol. Quelques Dewoitine réussissent à nouveau à décoller, mais sont interceptés au fur et à mesure par l’aviation adverse. C’est dans ce contexte que le LV Folliot, commandant de la flottille, est abattu au dessus de la mer, soit par la DCA des navires, soit par les avions américains.

Bien que nous connaissions les combats menés par les pilotes de la flottille de chasse (LV MIDOUX, FAIBRE, EV1 GLEIZE, GUYON, MAUBAN, PM BOUCHEREAU, Mtre MOULINIER, SM BRUN, BEDARD, DESNUS, MARPAUD, etc…) nous ne les décrirons pas ici. Retenons seulement qu’à l’issue de ces tragiques évènements, le bilan est lourd : mort du commandant de flottille et destruction du trois quart des appareils….. La citation de la flottille à l’ordre de l’Armée de mer, n’effacera pas pour autant l’amertume ressentie alors par son personnel.

Au terme des combats, la base aéronavale de Port-Lyautey est occupée par les Américains, et le restant de la flottille  s’installe sur le terrain d’Agadir, ayant perçu entre-temps d’autres Dewoitine  afin de recomplèter sa dotation.

En juin 1943, elle quitte Agadir et s’installe à Thiersville, non loin de Mascara en Algérie (La BAN Lartigue est alors entièrement occupée par les Américains). Les Dewoitine commencent à souffrir du manque de rechanges et il n’est nullement dans les projets des alliés d’affecter de nouveaux appareils aux deux escadrilles de chasse.

C’est dans ces conditions, qu’en février 1944, la flottille reprend possession du terrain de Lartigue libéré par l’aviation U.S. Elle va alors constituer 4 détachements de personnels qui vont être détachés durant un certain temps dans des escadrons de chasse de l’Armée de l’Air, et le 15 mai 1944 l’ex flottille de chasse du Béarn composée des 2 escadrilles cesse d’exister.

Notons que la 1AC renaîtra en 1945 sous la dénomination de flottille 1F, et la 2AC en 1948, sous celle de 12F. A cette époque, le terme de flottille ne correspondra plus à un groupement d’escadrilles, mais s’appliquera uniquement à la dénomination des formations de combat (le mot escadrille étant réservé aux unités de servitude, sauvetage ou encore d’écoles).

 

La flottille d’aviation 2F (escadrilles 1B et 5B)

Les divers changements d’appellation des 2 escadrilles et surtout leurs positions géographiques différentes l’une de l’autre jusqu’en janvier 1941 ne contribuent pas à présenter facilement cette flottille.

Pour résumer les appellations, notons tout d’abord que le 1er  octobre 1940, la flottille 2F est constituée par la réunion des escadrilles 10E et 1B. (La 10E avait été créée en novembre 1939 avec des FARMAN 222. La 1B avait vu le jour sous le nom d’escadrille B en avril 1940 dotée de LeO 45, et était devenue 1B en août).

En novembre 1940, l’escadrille 10E devient 5B. Nous avons donc en ce mois la flottille formée par 2 escadrilles de bombardement (1B et 5B) armées toutes deux en Glenn-Martin 167. Par suite de l’ajout de la mission de reconnaissance à celle déjà de bombardement, les 2 escadrilles prennent respectivement au 1er juillet 1941 les appellations de 1BR et de 5BR.

 

Activité de la 1B jusqu’en juin 1941

Sous les ordres du Lieutenant de Vaisseau PONCHARDIER* depuis le 1er septembre 1940, l’escadrille se trouve à la même date sur le terrain de Lartigue-Tafaraoui en Algérie terrain depuis lequel elle effectue quelques missions de reconnaissance au dessus de Gibraltar.

*Surnommé affectueusement « Le Ponch », le LV Ponchardier, qui trois ans plus tard sera à la tête du commando parachutiste de l’aéronautique navale créé en novembre 1944, s’illustrera en Indochine. Il disparaîtra le 27 janvier 1961 lors d’un accident aérien. Il était alors Vice-amiral.

Respecté par ses subalternes, c’était le genre de meneur d’hommes qui n’hésitait pas à « cogner » avec ses poings sur  ceux qui se montraient rétifs avec lui ou qui outrepassaient les règlements…

Le 18 septembre la 1B émigre au Maroc et s’installe à Port-Lyautey. Elle y effectuera 16 missions de reconnaissance au dessus du rocher de Gibraltar (entre le 20 septembre et le 24 novembre). Ces missions sont assez dangereuses, car les Glenn-Martin, dont les équipages effectuent des clichés photographiques sont toujours accueillis par la DCA  britannique. Des missions de patrouille à la recherche de convois ou de navires de guerre britanniques sont aussi à la charge de l’escadrille, au large du Maroc.

Fin décembre, elle émigre à Marrakech  où elle rejoint sa consoeur, la 5B, qui elle s’y trouve depuis un mois.

Jusqu’en mai 1941 l’activité des 2 escadrilles se partage en entraînements et explorations diverses. C’est à l’issue de ce mois que la 1B rejoint Dakar où elle retrouve la 5B, qui y est affectée elle aussi depuis une semaine.

 

Activité de la 5B jusqu’en juin 1941

Celle-ci est commandée par le Lieutenant de Vaisseau BRARD, et se compose de 6 appareils (tout comme la 1B). Fin novembre 1940 elle quitte Lartigue-Tafaraoui afin de rejoindre Marrakech au Maroc pour y stationner jusqu’en mai 1941. C’est depuis ce terrain, que l’escadrille à partir de janvier  va prendre le relais de la 1B pour les missions de reconnaissance au dessus de Gibraltar (25 missions réparties entre  le 3 janvier et le 25 février 1941). 

Jusqu'à son affectation au Sénégal en mai, les missions lui étant imparties sont d’ordre d’entraînements au bombardement ainsi que d’exploration au large des côtes marocaines lors de détachement de quelques uns de ses appareils à Rabat.

Le 20 mai 1941, la 5B quitte définitivement Marrakech, rallie alors le lendemain le  terrain de Ouakam non loin de Dakar, terrain sur lequel une semaine plus tard la rejoindra la 1B.

Les 2 escadrilles réunifiées au sein de la 2F, vont alors remplacer les 2B et 3B de la flottille 3F, qui assuraient jusqu’à présent une présence en AOF et qui de leur côté vont rentrer au Maroc.

 

Activité de la flottille en AOF

Suite à l’échec du coup de force en septembre 1940 tenté par les Français « libres » et les Britanniques, il est décidé par l’amirauté en AOF, d’organiser une surveillance  des approches de Dakar. A cet effet les bâtiments de surface et sous-marins en place sont plus ou moins utilisés. Une surveillance aérienne est également effectuée au dessus de Freetown et Bathurst (alors sous domination britannique), tout d’abord par les aéronefs de la flottille 3F (2B et 3B) et à partir du mois de juin 1941 par la flottille 2F.

La 2F est basée sur le terrain de Ouakam situé au bout de la presqu’île du Cap-vert à une vingtaine de km de la capitale sénégalaise. Sur ce terrain et avant guerre a été aménagée une piste destinée aux avions d’Air France lors de leur envol vers le Brésil. L’armée de l’Air et Air France partagent également le terrain de Ouakam à l’époque où la 2F vient y aménager.

Début juin le LV BRARD, commandant de la 5B, est détaché avec son équipage et son appareil à Conakry (Guinée française) afin de surveiller les forces britanniques au Sierra Leone. C’est lors de ce séjour que le 13 juin, cet aéronef est atteint par les tirs d’un Hurricane (PM LEMOINE et SM SCHREYECK tués). Le LV BRARD aux commandes de son Martin 167 en flammes est alors obligé d’amerrir non loin d’un bateau qui le fait prisonnier ainsi que le 2ème survivant (EV ESCHBACH). Tous deux sont alors internés à Freetown. Suite à ce coup dur, le commandement de la 5B est alors assumé pour peu de temps par le LV MORANGE (Le 22 août, à son tour, il est abattu par un Hurricane –aucun survivant parmi les LV MORANGE, I.M KOCH, SM CARPIER et QM RABATHALY). Pour la petite histoire, notons quand même que les 4 membres de l’équipage seront enterrés avec les honneurs militaires par les Britanniques.

Entre-temps et le 1er juillet les 2 escadrilles de la flottille sont renommées 1BR et 5BR.

Le 25 septembre le LV JOLIVET de RIENCOURT est nommé à la tête de la 5BR (l’intérim depuis le décès de BRARD ayant été assuré par le LV JUMÈRE). 

Malgré les restrictions d’essence, les entraînements au bombardement en semi-piqué, ou piqué vertical, se poursuivent tant bien que mal, de même que les reconnaissances aériennes au dessus des possessions britanniques.

A partir du mois de décembre 1941, la dotation de la 2F se monte à 17 appareils (8 pour chaque escadrille et 1 réservé au commandant de flottille).

En mai 1942, le LV PONCHARDIER rejoint la France (où recruté par le CF NOMY il  monte un réseau de renseignements au service des alliés) et le LV VILBERT devient alors le nouveau commandant de la 1BR.

Jusqu’au mois d’octobre 1942, les reconnaissances et exercices se poursuivent (malgré quelques accidents sans morts d’hommes).

Le 11 octobre une mission de reconnaissance au dessus de Freetown est décidée, afin de savoir si des bâtiments de guerre  se trouvent dans cette rade.  Deux Martin 167 de la 1BR sont alors désignés pour cette mission. Dans l’un d’eux a pris place le CF DAILLIERE (ex pilote du Jules Verne, et commandant de l’Aéronautique navale en AOF depuis le 31 janvier 1942). Cet appareil (le 1BR-VII) est attaqué à l’est de Freetown par des chasseurs britanniques. DAILLIERE au poste de mitrailleur, leur envoie des rafales. L’un des chasseurs réplique. Tant bien que mal le pilote du Martin 167 réussit à s’échapper, volant en rase mottes et à poser son appareil en catastrophe à Conakry. A l’intérieur de l’appareil, le commandant Aéro de l’AOF est décédé, atteint d’une balle britannique en plein front.

Le Vice-amiral commandant en chef les forces navales le citera à l’ordre de la nation :

« Tombé en plein ciel d’Afrique, pour la défense de l’Empire et de l’unité française, la Marine conservera pieusement la mémoire légendaire de l’ancien commandant du Jules Verne et son sacrifice, à la suite de tous ceux qui ont déjà offert leur vie pour que la France vive, sera toujours présent à l’esprit de ses camarades de l’Aéronautique navale pour porter leur arme à la place de choix que leur réserve la Marine de demain. »

Le 8 novembre 1942 a lieu le débarquement américain en Afrique du Nord. Après quelques jours de flottement, le gouverneur général de l’AOF, Boisson, décide de se rallier le 21 novembre, et le 7 décembre (suite à l’accord Darlan- Eisenhower-Boisson) toutes les troupes françaises de l’Afrique occidentale française se rangent aux côtés des Alliés.  Désormais une page est tournée et l’Aéronautique navale stationnée au Sénégal va à partir de ce moment là, œuvrer pour de nouvelles missions. Ces missions se tournent vers l’éclairage et la protection des convois qui transitent le long des côtes d’Afrique. Néanmoins ces dernières, au sein de la flottille, se font avec des aéronefs vieillissant et des accidents graves surviendront :

- 25 janvier 1943 à Atar, le 1BR-VII lors de son atterrissage est heurté et haché par l’hélice d’un P40 Curtiss américain se posant lui aussi (Mort du QM mitrailleur LOWENSKY).

- 4 mars 1943 à Port-Etienne, le pilote du 5BR-III obligé de se reposer suite à une avarie en vol de l’appareil, ne peut le faire qu’in extremis. L’avion heurte alors un talus, est renvoyé en l’air puis retombe sur son train d’atterrissage, continue sa course folle et va heurter un bâtiment de casernement. (4 morts parmi les membres de l’appareil : Général TRISTANI des troupes coloniales, OE2 MAGUEUR, QM DEMOTIER et QM LE POLOZEC). Seul le pilote (LV JOLIVET) sort à peu près indemne de cet accident.

- 22 mai 1943 lors d’un décollage à Ouakam, le Martin n° 5BR-V du LV DELMAS (commandant de la 5BR depuis mars), à une quinzaine de mètres d’altitude, subit une abattée et retombe au sol en touchant avec une aile.– Bilan : Décès du LV DELMAS et du Maître pilote MIRANDA.

 

Un accord étant intervenu pour l’octroi d’appareils britanniques, un groupe de personnel de la flottille est envoyé à Bathurst le 21 janvier afin d’être instruit sur la maintenance d’avions Lockheed Hudson.  Le 1er de ces appareils est livré le 3 février et convoyé le 6 à Dakar. La 1BR sera la seule escadrille a percevoir ce type d’aéronefs ; elle en possèdera 4 au mois de mars de cette année, et en perdra 3 par la suite (le 1er le 29 mars à Port Etienne et le second, le 16 juillet à Alger – Ces 2 accidents se produiront sans mort ni blessure parmi le personnel). Par contre le 4 août, le n° 3 après avoir décollé de Ouakam et atteint une altitude d’une cinquantaine de mètres, son pilote (EV DOUXAMI) pour une cause non élucidée est obligé de le reposer. Avant de toucher le sol, l’avion  fauche des arbres puis vient buter à grande vitesse dans une haie. L’un des moteurs est arraché et l’aéronef prend feu puis explose. Tout l’équipage (EV DOUXAMI, EV GUICHARD, SM TOUCHARD, SM NEDELEC et QM RIO) périt dans le brasier.

La flottille devant ensuite être rééquipée en avions Wellington, (cinq sont déjà présents à Ouakam fin juillet), les 2 escadrilles vont alors être dissoutes (les Martin 167F  sont reversés à l’école du personnel volant, en AFN). La 5BR le sera début août et la 1BR en octobre. Néanmoins, une bonne partie du personnel va alors être réintégré au fur et à mesure dans la toute nouvelle flottille 2FB équipée en Wellington, et nous présenterons celle-ci dans un prochain chapitre.

 

La flottille d’aviation 3F (escadrilles 2B et 3B)

 

L’escadrille B3 (héritière de la 3B2) a été dissoute le 1er avril 1940.  Entre temps des avions américains Glenn-Martin 167 avaient été commandé par l’Armée de l’Air, et une partie de cette commande était réservée à l’Aéronautique navale. Au mois de mai 1940, quelques uns de ces appareils sont livrés à Rochefort et permettent d’équiper l’escadrille 3B (qui succède alors à la B3 dissoute un mois auparavant).

Juste avant l’armistice de juin, cette escadrille sous les ordres du LV JALABERT parvient à rejoindre le Maroc avec ses appareils, et s’installe jusqu’en novembre sur le terrain de Médiouna.

En ce même mois de juin, de nouveaux Glenn-Martin sont délivrés à l’Aéronautique navale et permettent de former d’autres escadrilles de bombardement, dont la 2B commandée temporairement par le LV TRAUB, puis par le LV PACAUD de septembre 1940 à octobre 1942) .

La réunion de ces 2 formations (2B et 3B) va alors former, la flottille d’aviation 3F sous le commandement du LV JALABERT (ce dernier laissant alors la direction de l’escadrille 3B au LV HARDY, en décembre). Notons que suite aux conventions d’armistice, chaque escadrille ne possède que 6 appareils.

Basées à Médiouna (la 3B) ou à Port-Lyautey à compter de septembre (pour la 2B), elles participent à des vols d’intimidation et de reconnaissance au dessus de Gibraltar.

Le 6 octobre 1940 en réponse à l’attaque sur Dakar par les forces Franco-anglaises, les 2 escadrilles sont envoyées en renfort au Sénégal. Après escales à Tindouf, puis Atar, les appareils parviennent à Dakar où le 12 octobre ils se retrouvent au nombre de 10, sur le terrain de Ouakam (2 appareils de la 2B ayant été accidentés au cours du transit et n’étant remplacés que le 19 novembre).

A Ouakam les conditions de vie sont assez spartiates. Rien n’a été préparé pour accueillir le personnel et ce dernier doit se débrouiller pour s’installer et vivre. L’équipage est logé dans des baraquement plus ou moins crasseux et va manger fort mal à une cuisine de l’Armée de l’Air aux Mamelles ; Les avions n’ont pas de hangars et stationnent le long de la piste. Tout cela est très inconfortable, d’autant plus que les hommes mal nourris et mal logés, fatigués par le climat, sont une proie facile pour le paludisme qui fait des ravages, et il y a en permanence 10 pour cent du personnel alité….

A compter du 26 octobre des reconnaissances aériennes débutent au dessus des ports de Bathurst et de Freetown, ainsi que des abris de Sherbro. Les avions font en général escale à Conakry au retour. Ces missions se poursuivent durant tout le séjour de la flottille en AOF, dans des conditions souvent dangereuses à cause d’une DCA de plus en plus active du côté de Freetown.

Les conditions matérielles s’améliorent un peu au fil du temps : une grande baraque en bois est construite en face du bar d’Air France et sert de bureau. D’autres parts les équipages sont enfin logés dans des conditions de confort et d’hygiène acceptables dans la cité antiamaril réquisitionnée en février 1941.

Les exercices et entraînements  réduits à 5 heures par mois, sont réservés au bombardement en semi piqué avec parfois des exercices en piqué au dessus du RICHELIEU amarré dans le port de Dakar.

En février l’EV COMBIER de la 2B comble une lacune. Il vient de dessiner l’insigne de son escadrille. Ce dernier représente une tête de gazelle vue de face, en souvenir des escales de Tindouf et Atar. Ce dessin soumis à l’approbation de l’Etat major général est alors accepté puis peint sur les appareils. (La 3B de son côté arbore celui de l’ex escadrille 3B2, représentant une étoile et un quartier de lune).

Fin mai/début juin, la flottille est remplacée à Dakar par la 3F (1B et 5B) et la 2F revient alors à Port-Lyautey.

Les missions qui lui sont confiées sont en général celles de protection de convois Casablanca-Dakar le long des côtes marocaines et du Rio de Oro. (Lors de ces missions, les avions concernés sont basés à Agadir).

En fin  1941, les pluies rendent comme chaque année  le terrain de Port-Lyautey inutilisable (la piste cimentée n’existe encore pas). Cette boue, contraint l’état-major à aller faire hiverner la flottille à Fès.

Le 15 mai 1942, les caisses de matériels sont à nouveau remplies, et les deux escadrilles rentrent au bercail à Port-Lyautey.

A la date du 8 novembre 1942, les commandements se répartissent ainsi :

- La flottille est commandée par le CC MATHON (depuis le mois de mai).

- L’escadrille 2B est sous les ordres du LV LEGRIS de la SALLE (qui a remplacé PACAUD le 10 octobre).

- L’escadrille 3B est toujours commandée par le LV HARDY.

Comme vu dans les précédents volets, c’est ce 8 novembre que débute l’offensive américaine en Afrique du Nord. Voici ci-dessous, le récit de ces évènements (vus du côté de l’escadrille 2B) et qu’avait rédigé une personne, quelques années plus tard :

« Le 8 novembre 1942, un dimanche, vers 3 heures du matin l’alerte est donnée à la base de Port-Lyautey : les troupes anglo-américaines opèrent un débarquement en AFN ; on n’a guère de détails, sinon que le débarquement a déjà commencé en Algérie et qu’on s’attend à une opération identique sur les côtes marocains.

La réaction est imminente : branlebas pour tout le personnel présent, rappel de tous les permissionnaires en ville, ordre de sortir les appareils du hangar et de compléter les pleins, mise à poste des groupes de défense de la base.

Vers 4 heures on commence à pousser les avions hors du hangar et à faire les pleins.

Vers 5 heures, ordre du commandant 3F de hisser les bombes, de compléter les armements, de tenir les équipages parés.

Ces mouvements s’effectuent très lentement pour les raisons suivantes :

-Interruption du courant électrique vers 5 heures, nuit noire, manque presque total de moyens d’éclairage de secours.

-Absence de nombreux permissionnaires qui n’ont pas encore rallié.

-La presque totalité des non-volants présents, arme un groupe de combat (2 mitrailleuses et 2 fusils mitrailleurs).

Pourtant il faut faire vite car l’aube approche et on entend déjà une violente canonnade dont les lueurs sont visibles au dessus de Mehedya (plage non loin de Port Lyautey) où le débarquement a déjà commencé.

Dès l’aube, les chasseurs de la 1F décollent et commencent à attaquer à la mitrailleuse et au canon les chalands de débarquement. Ils nous déclarent à leur retour que de nombreux bâtiments de guerre ou de transport sont visibles le long de la côte.

Le lever du jour et la réduction du groupe de combat à 8 hommes de la 2B, permettent d’accélérer la préparation des avions.
A 7h40, le 2B1 (LV Cambon, SM Roujon, QM Ancergues et Seurr) équipé en réservoir supplémentaire décolle pour une mission d’exploration le long de la côte entre la frontière espagnole et le Mazagan.

Il reste à la 2B :

- Le 2B2 (LV Legris, Mtre Bézard, Mtre Sorbier).

- Le 2B3 (LV Nicolle, IM Thenin, SM Tretout, QM Lebreton).

- Le 2B4 (EV Legoascoz, Mtre Buhot-Launay, PM Fritsh, SM Marchesseau)

- Le 2B5 (LV Commines, SM Gouraud, SM Wartelle).

- Le 2B6 (EV Combier, Mtre Leborgne) se trouve à Agadir en compagnie d’un appareil de la 3B.

A 8h30 enfin, les avions sont parés, bombes et armement en place.
A 8h40, ordre du commandant 3F de mettre en route les avions pour effectuer une mission de bombardement sur les bâtiments de guerre devant Mehedya. Attaque simultanée en piqué de tous les avions suivant le thème habituel. Objectif au choix des chefs de bord. Les appareils rallieront ensuite le terrain auxiliaire de Sidi-Yaya (à 2O km dans l’est de Port-Lyautey.

A 9 heures, les 8 appareils disponibles de la 3F (le 3F, quatre de la 2B, trois de la 3B) sont rassemblés à l’origine de la piste de décollage nord-sud, parés à décoller. A ce moment, les équipages aperçoivent de nombreux avions venant du sud, des ennemis évidemment. Il faut faire vite pour décoller, d’autant plus que nous n’avons aucune chasse amie en l’air.

Le décollage commence, un à un, sur la piste de 30 mètres de large ; tout se passe parfaitement, comme à l’exercice, mais les derniers avions, ceux de la 3B, décollent au milieu des bombes qui commencent à tomber. Les chasseurs ennemis (des Grumman-Martlett américains) attendent les malheureux Glenn-Martin et les attaquent à tour de rôle, au fur et à mesure des décollages. Le 3F (CC Mathon, LV Billioque, Mtre Bedu et QM Pradines) décollé le premier est presque aussitôt attaqué : on voit une explosion sur le fuseau moteur droit, puis l’appareil est perdu de vue, vraisemblablement réfugié dans les nuages très bas. On ne connaitra  jamais exactement le sort de cet avion. Ce n’est que quelques semaines plus tard qu’on retrouvera sur la plage au nord de l’embouchure du Sébou, le corps du CC Mathon, puis peu après celui du QM Pradines et quelques débris identifiables de l’appareil.

Le 2B2, décollé second, est attaqué aussitôt après par 2 chasseurs ; en feu, il vire à gauche, pique, redresse très près du sol, remonte en chandelle à 200 mètres. L’équipage saute en parachute, l’avion explose en l’air puis s’écrase au sol où il continue de brûler.

Le 2B3 et le 2B5 qui cherchaient à rallier leur commandant, se dérobent alors en rase-mottes vers l’Est poursuivis un moment par des chasseurs ennemis, heureusement plus lents qu’eux. Le 3, tiré de loin n’est pas touché, le 5 n’est pas rattrapé. Par contre le 2B4 qui décollait dernier de l’escadrille n’a pas pu se dérober assez vite et est sévèrement touché mais ne prend pas feu. Les avions de la 3B attaqués à leur tour s’en tirent plus ou moins heureusement.

Pendant plus d’un quart d’heure, les appareils tournent à très basse altitude au dessus de la forêt de la Mamora, espérant que les chasseurs ennemis vont se retirer ou que les amis (dont on est sans nouvelles) vont venir apporter leur protection indispensable pour l’exécution de la mission de bombardement ordonnée, car dès qu’un Glenn tente de s’approcher du secteur Port-Lyautey-Mehedya, il se heurte aussitôt à un nombre important de chasseurs ennemis. Toute tentative d’attaque dans ces conditions semble vouée à l’échec pour des appareils isolés et sans protection de chasse. Or les chasseurs français ne paraissent toujours pas (on apprendra par la suite, qu’ils ont presque tous été détruits au sol à Port-Lyautey) ; aussi les Glenn vont-ils successivement se poser à Sidi-Yaya pour se regrouper et prendre des ordres. Atterrissage entre 9h25 et 9h40 : Le 3 se pose normalement, le 5 s’embourbe en fin de course dans le sol très mou, les hélices labourent un peu le sol, mais l’appareil n’est pas avarié quoique profondément enlisé. Le 4, très avarié (une vingtaine d’impacts ont coupé des commandes et surtout crevé et vidé le circuit hydraulique) se pose sur le ventre. Un autre appareil qui tournait autour du terrain s’écrase au sol sans raison apparente, c’est le 3B-3 (LV Jumere). Le 3B2 (LV Simon) atterri le premier, a été très durement touché par les attaques ennemies et se répare tant bien que mal.

A 10heures, 05 le 2B1 atterrit, rentrant de mission menée avec beaucoup de courage et d’intelligence dans des conditions difficiles ; il a longé la côte de Larache à Mazagan à très basse altitude, au milieu de très nombreux bateaux ennemis, dans une DCA presque continuelle et souvent violente ; malgré quoi le LV Cambon a chiffré et expédié d’utiles messages de renseignements, tandis que Roujon attaquait à la mitrailleuse des chalands de débarquement et même un petit hydravion ennemi.

Le terrain de Sidi-Yaya détrempé par les pluies est très mauvais. Le 2B3 en roulant au sol s’embourbe et en le dégageant, ses hélices heurtent un obstacle et sont avariées. L’appareil devient indisponible.

Le 5 n’est toujours pas désembourbé faute de moyens. Des véhicules de l’échelon roulant qui rallient, s’enlisent à leur tour ; des chasseurs de la 1F qui ont réussi à évacuer Port-Lyautey subissent le même sort à l’atterrissage. Aussi l’ordre est donné de diriger sur Meknès tous les avions capables de décoller.

A 14 heures, le 2B2 décolle en même temps que le LV Simon et va à Meknès. Le LV Nicolle rallie Port-Lyautey en Nort-América et assure le convoyage, avec le QM Sarramiac de la 2B, d’un Glenn de la 3B à Mehnès.

A 15h30, le 2B5 enfin désembourbé, est amené au début de la piste prêt à décoller. Comme le LV De Commines va mettre les moteurs en route, les chasseurs ennemis arrivent sur le terrain, tournent en rond quelques temps puis commencent à mitrailler les avions et véhicules qui s’y trouvent. Le 2B5 ne décollera pas. Incendié un des premiers, il explose avec ses bombes. Le 2B3 subit le même sort presque aussitôt après. Seul le 2B4 posé sur le ventre n’est pas attaqué, mais il n’en vaut guère mieux. Les équipages à l’abri sous les arbres en bordure du terrain, assistent impuissants à la destruction de leurs appareils.

Quand les Grumann s’en vont, il ne reste plus que quelques tas de ferraille en train de brûler.

Cette journée du 8 novembre a coûté cher à la 3F, qui a perdu son commandant (le CC Mathon), son adjoint le LV Billioque, le commandant de la 2B (le LV Legris de la Salle), le commandant de la 3B (le LV Hardy), auxquels il faut ajouter le LV Jumere, 3 officiers-mariniers, 2 quartiers-maîtres.  Quatre appareils ont été détruits en vol, et  trois au sol sur les 9 qui ont participé aux opérations. »

Le 14 novembre, les survivants des avions de la flottille quittent Meknès et partent s’installer à Agadir.

Cette période de 17 mois que la 3F passe à Agadir jusqu’à sa dissolution est une période de demi sommeil et d’attente, pendant laquelle en attendant un nouveau matériel qui n’arrive pas, les équipages font de leur mieux pour faire durer les Glenn et participer autant qu’ils le peuvent, aux opérations du côté des Alliés.

Le 21 avril 1944 la flottille 3F (alors sous les ordres du CC Lainé) est dissoute. Ce même jour la 2B commandée par le LV de Commines de Marsilly, l’est également. La 3B (sous commandement du LV Nicolle) quant à elle, a été dissoute 4 jours auparavant.

La 3B renaîtra en juillet sous le nom de 3FB armée en SBD Dauntless.

Pour la 2B et son insigne à tête de gazelle, il faudra atteindre 1953 pour la voir réapparaître. Elle se nommera alors 21F.

 

La flottille d’aviation 4F (escadrilles 6B et 7B)

Nous avions abandonné les escadrilles AB2 et AB4 au lendemain de la campagne de France en juin 1940.

Réfugiées toute deux en Afrique du Nord, elles sont rééquipées en Glenn-Martin 167  au mois d’août 1940 et stationnent à Lartigue-Tafaraoui en Algérie où elles prennent respectivement les appellations de 6B et 7B le 1er novembre.  La réunion de ces 2 formations se nomme 4ème Flottille d’aviation (ou 4F) le 1er décembre.

- La 6B est commandée par le LV ZIEGLER (du 20 septembre 40 au 28 juin 41), puis par le LV ORTOLAN (jusqu’au 19 mars 43) et enfin par le LV DELRIEU (du 19 mars 43 au 1 juin 43).

- La 7B est sous les ordres du LV LAINÉ (jusqu’au 28 juin 41), puis commandée par intérim jusqu’au 4 mai 42 par les LV LE SAINT, LV COURALET et à nouveau LE SAINT.  Le LV CAILLOT prend le commandement du 4 mai 42 au 1er mars 43, puis le LV KERROS assume cette responsabilité jusqu’au 1er juin 43.

- La flottille est tout d’abord sous les ordres du CC HUBERT jusqu’au 2 juillet 41. Lui succèdent en intérim jusqu’en octobre 41 les LV ORTOLAN et COURALET.  Le LV MENVIELLE assume quant à lui le commandement d’octobre 41 à juin 1943.

Nous arrivons au mois de juin 1941.

En 1941, le Levant (alors sous mandat confié à la France par la SDN) était alors sous l'autorité du gouvernement de Vichy, mais il suscitait la convoitise (proximité du pétrole irakien) de la part des parties belligérantes, ainsi que la possibilité pour l’Allemagne d’intervenir contre les Britanniques en occupant le canal de Suez (même motif qu’en 1914…). La Grande Bretagne de son côté n’avait accepté que du bout des lèvres que la France soit présente en ces lieux, et enfin le général De Gaulle réfugié en Grande Bretagne où il avait commencé à instituer les « forces française libres » souhaitait enlever à « Vichy » ces territoires afin de les mettre de son côté (A cet effet la 1ere division forte de 4500 hommes est créée sous le commandement du Général Legentilhomme).

En avril 1941, l’Irak retrouve son indépendance et son gouvernement penche plutôt du côté allemand. Les conduites de son pétrole qui se dirigeaient vers la Palestine sont coupées, et le pétrole transite alors vers la Syrie par un pipe-line réouvert à cette occasion.

Les Allemands qui ont déjà occupé la Grèce puis l’île de crête, sont alors très proches de la Syrie, et font peser une lourde menace contre le canal de Suez. A cet effet, ils contactent le gouvernement de Vichy en lui intimant d’apporter un soutien et une facilité d’accès pour ses avions transitant vers l’Irak (autorisations de se poser à Damas et à Beyrouth).

Les Britanniques réagissent alors, renversent le gouvernement en place en Irak et attaquent les forces françaises de Vichy stationnées en Syrie et au Liban.

Ces forces françaises fortes d’environ 30 000 hommes et sous le commandement du Général Dentz vont alors être confrontées durement à partir de début juin aux forces anglo-australienne.

C’est dans ce contexte que la Marine et l’Aéronautique navale françaises furent appelées en renfort. Nous ne décrirons pas ici les combats qui furent menés par les troupes au sol, combats qui se terminèrent le 10 juillet par la victoire chèrement acquise du côté Britannique.

Au début de l’attaque  britannique, les troupes venues du Caire remontent la côte,  protégées par les canons d’une escadre anglaise. Du côté français, la division navale du Levant commandée par l’Amiral GOUTON, oppose 2 contre-torpilleurs (VALMY et GUEPARD)ainsi que 3 sous-marins, division à laquelle viendra s’ajouter, venus de métropole, les Contre-torpilleurs CHEVALIER PAUL et VAUQUELIN. Durant ces combats qui opposèrent les deux Marines, nous perdrons le CHEVALIER PAUL (coulé le 16 juin 1941 devant chypre par un avion torpilleur anglais) et le sous-marin SOUFFLEUR (torpillé le 25 juin par l’HMS Parthian).

La flottille 4F (6B et 7B), partie d’Algérie et ayant transité par Brindisi et Athènes, arrive le 13 juin 1941  à Majdaloun (petit village du Liban dans la plaine de la Bekaa, au sud de Baalbeck). La première mission qui lui est confiée est celle de l’attaque de contre-torpilleurs anglais qui prennent à revers avec leur artillerie, les troupes françaises du littoral sud-libanais. Cette mission se réalise parfaitement, ces navires quittant immédiatement la zone après que l’un d’entre-eux eut reçu une bombe sur la plage arrière.

Le 28 juin, 6 Glenn-Martin de la flottille bombardant non loin de Palmyre des concentrations britanniques, sont pris à partie par des Curtiss P40 australiens. Les assaillants au nombre d’une vingtaine, abattent tour à tour nos 6 appareils : Bilan 20 morts du côté français (dont le LV ZIEGLER commandant la 6B). Quatre rescapés sont grièvement blessés et pourront en réchapper (LV LAINÉ commandant la 7B, EV MASSICOT, Mtre SAROTTE et SM GUÉRET).

 Le 2 juillet, les aéronefs encore opérationnels, bombardent des positions à Haïfa. Durant cette opération le CC HUBERT (commandant de la flottille) est abattu et trouve la mort. C’est dans ce contexte que le LV ORTOLAN commande alors ensuite la flottille par intérim.

 

Juste avant la fin de tous ces engagements, le 9 juillet, trois Glenn-Martin de la flottille accompagnés de cinq Dewoitine de la 1AC sont confrontés à une vingtaine de Bristol Blenheim et de Curtiss P40. Les trois Glenn-Martin arrivent à s’échapper, tandis que les chasseurs de la 1AC abattent 6 de leurs adversaires (perte néanmoins de 2 Dewoitine).

Le 11 juillet (la guerre est finie au profit des Britanniques), les 4 aéronefs plus ou moins rescapés de la flottille (sur les 13 engagés depuis juin) reçoivent l’ordre de regagner l’Afrique du Nord.

Nota :Afin de ne rien oublier, signalons qu’outre la flottille 4F, trois autres unités de l’Aéronautique navale participèrent à ces engagements en Syrie : La 19S (armée en Loire 130, commandée par le LV Brossier et basée depuis sa création en décembre 1939 à Tripoli du Liban, et qui subit de lourdes pertes), l’escadrille de torpillage 1T (dotée de Latécoère 298, commandée par le LV Jourdain, basée en temps normal à Karouba en Tunisie), et enfin l’escadrille de chasse 1AC (dotée de Dewoitine 520, commandée par le LV Cassé et basée à Lartigue-Tafaraoui en Algérie. Durant ces évènements elle stationnera à Alep en Syrie puis à Majdaloun au Liban).

Devant l’hémorragie subie par la flottille (75% de ses appareils détruits au cours de la campagne de Syrie), cette dernière abandonne ses derniers Glenn-Martin et se rééquipe à compter du mois de septembre 1941 en Lioré et Olivier 45.1 déstockés d’Hyères ou de Port-Lyautey.

Le 5 janvier 1942 avec 11 de ses appareils, la flottille participe à l’escorte du DUNKERQUE lors de sa sortie de Mers-El-Kébir vers Toulon.

Durement touchées lors du débarquement américain en Algérie en novembre 1942, la flottille et ses 2 escadrilles seront dissoutes le 1er juin 1943. La 6B renaîtra peu de temps après sous l’appellation de 4F, quand à la 7B il faudra atteindre le 15 octobre 1953 pour la voir réapparaître  sous le nom de 15F.

 

La flottille d’aviation 5F (escadrilles 1T et 2T)

La flottille 5F regroupant les escadrilles 1T et 2T est créée le 1er novembre 1940, mais son premier commandant,  le  CC VIDEAU ne sera désigné qu’à compter du 1er janvier 1941. Il sera remplacé le 17 avril 1942 par le LV BARON qui conservera ce commandement jusqu’à la dissolution de la flottille en novembre 1942.

Lors du débarquement allié en novembre 1942, la flottille perdra 12 hommes, trois Laté seront détruits et deux autres gravement endommagés

Les 8 Laté 298 restants formeront alors une nouvelle escadrille qui prendra le nom de 4S1 le 12 décembre 1942 et qui oeuvrera à côté des Alliés.

L’escadrille 1T (ex 4T1/T1)

Elle est comme sa sœur la T2 est armée avec des hydravions torpilleurs Latécoère 298.

Depuis le 7 août 1939 elle est sous les ordres du LV Cambon, celui-ci laissant la place le 15 mars au LV Jourdain qui assumera cette fonction jusqu’au 1-12-1942 et qui en sera le dernier commandant.

Au mois de septembre 1940, armée avec 6 appareils, elle se trouve à Karouba, où elle ne reste que peu de temps (le 10 octobre elle part à Arzew en Algérie jusqu’au 15 novembre afin d’y relever la 2T). Après avoir passé un mois à Karouba, elle repart à nouveau vers Arzew pour y séjourner du 18 décembre 1940 au 18 mars 1941.

Le 26 juin 1941, le LV Jourdain son commandant reçoit l’ordre de préparer ses hydravions en vue de leur envoi au Liban, où se déroulent des engagements meurtriers entre Français et Britanniques. Après une escale à Athènes, les six Laté 298 arrivent à Tripoli le 4 juillet. Sur place, l’escadrille engagera quelques missions sans importances et fera retour à Karouba le 14 (après escales à Castellorizo et Rhodes).

Ci-dessous, la photo représente un Laté de l’escadrille 1T en juin 1941 dans le port du Pirée à Athènes. On peut distinguer en arrière plan, un Dornier 24 de la Luftwaffe (les Allemands occupent à cette époque la Grèce)…

Les activités d’entraînement reprennent alors en Tunisie (quelques déplacements sont enregistrés à Sousse puis sur l’étang d’El Mella).

Ecoutons un spécialiste nous décrire la mission de largage d’une torpille depuis un hydravion : « Mission délicate parce que la torpille est un engin fragile, qu’il faut larguer le plus lentement possible, près de l’eau pour qu’elle ne casse pas et prenne une immersion correcte. Pour diminuer ces risques, les appareils arrivaient en formation à environ 1000 mètres d’altitude puis, individuellement, chacun d’eux descendait le plus vite possible en décrivant des « S » rapides pour déjouer la DCA, redressait le plus près de l’eau, réduisait sa vitesse, lâchait sa torpille et dégageait enfin ».

L’escadrille quitte définitivement Karouba en mai 1942 pour rejoindre Arzew où elle rejoint sa consoeur la T2 qui y stationne depuis mars 1941.

Lors du débarquement allié le 8 novembre 1942, la BAN d’Arzew est attaquée et occupée par les Américains. L’escadrille est alors dissoute peu de temps après (le 1-12-1942).

L’escadrille 2T

Après avoir quitté la France le 21 juin 1940, cette escadrille rejoint Bougie en Algérie et de là, part pour l’étang d’El Mella. Elle séjourne ensuite à Karouba du 13 juillet au 5 septembre, puis revient pour quelques temps à Arzew (des tours de garde sont imposés à la 1T et 2T en ce lieu).

Ce n’est que le 20 mars 1941 que la 2T prend définitivement ses quartiers sur la BAN d’Arzew.

Le 5 janvier 1942 avec 5 de ses appareils, elle participe à l’escorte du DUNKERQUE lors de sa sortie de Mers El Kébir vers Toulon.

Le 6 février de cette année là, un grave accident dû à une manœuvre à basse altitude, fait toucher la mer à une aile d’un de ses appareils à bord duquel se trouvent 3 membres d’équipage. Déséquilibré le Laté 298 s’écrase un peu plus loin. (Bilan 2 morts : LV LEPELTIER (commandant de l’escadrille) et SM DESAIRE qui congestionnés par le froid périssent noyés. Un seul rescapé le SM radio MOAL).

Tout comme l’escadrille 1T, la 2T sera dissoute le 1er décembre 1942.