La reconstitution

de l’Aéronautique navale

 

 

 

Le contexte

 

En novembre 1942, se déroulent deux évènements importants.

- Le 8 de ce mois, lors de l’opération Torch, les Alliés débarquent au Maroc et en Algérie. Obéissant aux ordres de Vichy, nos marins résistent et le bilan est lourd : 11 bâtiments français coulés, 25 hors de combat, 751 morts et 553 blessés. Pour l’Aéronautique navale, nous avons vu précédemment les pertes subies.

- Les Allemands, suite à ce débarquement, envahissent la zone libre, occupent les bases (Hyères, Fréjus, Berre et Saint-Mandrier) et s’emparent de tous les aéronefs. Il en va de même à Bizerte en Tunisie. Le 27 novembre, la 7° Panzer, les bataillons Heibronn et Weitzel ainsi que la division Das Reich franchissent les limites du camp retranché de Toulon, et pénétrant au sein de l’arsenal tentent de s’emparer de toute la Flotte française. A 5 heures 30, la colonne Weitzel franchit la porte Castigneau, tandis que la colonne Heilbronn passant par la porte de la pyrotechnie s’avance vers Milhaud. C’est à ce moment là que l’amiral de LABORDE à bord du Strasbourg ordonne enfin par radio (ondes courtes) l’ordre de sabordage de la Flotte.

 

 

Passant dans le camp allié, la Marine, stationnée en Algérie, au Maroc et au Sénégal, fusionne au mois d’août 1943 avec celle des FNFL, pour reformer à nouveau la Marine nationale. Son état-major en place alors à Alger, dirigé par le Contre Amiral LEMONIER, va faire pleuvoir des demandes de matériel auprès des Américains. Demandes qui seront honorées à partir de 1944 (Destroyers d’escorte, escorteurs côtiers, chasseurs de sous-marins, dragueurs de mines et aéronefs).

L’Aéronautique navale, se reconstitue donc peu à peu par l’octroi de nouveaux appareils affectés par les Alliés. Ces octrois  se réalisent grâce à trois officiers : Tout d’abord, le Capitaine de Corvette LAHAYE, qui nous l’avons vu précédemment dans le chapitre consacré aux FNFL arrive à négocier auprès des Américains la cession d’hydravions Catalina qui arment la flottille 6FE. De son côté le Contre-amiral AMANRICH, obtient des Britanniques, la livraison de Lockheed Hudson, de Vickers Wellington, de Short Sunderland ainsi que de Supermarine Walrus.  Ces appareils affectés au sein des formations 2FB, 7FE et 4S demeurent jusqu’à la fin des hostilités, sous le contrôle opérationnel du Coastal command, et voués à la surveillance maritime.

Un troisième homme, le capitaine de vaisseau NOMY, obtient en 1944 et à nouveau de la part des Américains une seconde livraison d’hydravions Catalina qui arment la flottille 8FE. Il obtient également la cession d’une quarantaine de bombardiers en piqué SBD Dauntless qui sont affectés dans 2 autres flottilles, les 3FB et 4FB, flottilles qui avec ces appareils vont oeuvrer lors de la suppression des poches allemandes de l’Atlantique.

 

     

                                                      LAHAYE NOMY                  AMANRICH

 

D’autre part, certains avions ou hydravions datant de la fin des années 30 et encore disponibles, sont  à nouveau mis à contribution. Ce sera en particulier le cas pour les Latécoère 298 qui constituent l’escadrille 2S.

Par contre, la Marine nationale n’obtient jusqu’à la fin des hostilités aucune cession d’aéronef de chasse, le refus présenté par les Alliés étant que celle-ci ne possède aucun porte-avions.*

*Nous avons vu dans le chapitre consacré à l’AFN, que la flottille 1F (1AC et 2AC) par suite de la non affectation de nouveaux matériels, avait été dissoute en 1944 et son personnel dispersé dans des groupes de chasse de l’Armée de l’Air.

 

La circulaire n° 109 EMG/Aéro du 6 octobre 1943 précise les appellations et missions des formations existant à cette époque :

 

- 1FC : 1ère flottille de chasse (escadrilles 1C et 2C)

Devient 1F après guerre, puis 11F en 1953.

- 2FB : 2ème flottille de bombardement (escadrilles 1B et 5B)

Devient 2F après guerre, puis 23F en 1953.

- 3FB : 3ème flottille de bombardement (escadrilles 2B et 3B)

Devient 3F après guerre.

- 4FB : 4ème flottille de bombardement (escadrilles 6B et 7B)

Devient 4F après guerre.

- 5FS : 5ème flottille de surveillance (escadrilles 2S et 4S)

N’existe plus à partir de 1944.

- 6FE : 6ème flottille d’exploration (escadrilles 1E et 2E)

Devient 6F après guerre.

- 7FE : 7ème flottille d’exploration (escadrilles 3Eet 4E)

Devient 7F après guerre, puis 27F en 1953

 

Voici donc ci-après, un aperçu sur les nouvelles formations qui ont permis la renaissance de l’Aéronautique navale française.

 

Flottille 2FB

 

Devise : "Quand je trouve, je pique."

 

Hymne :

(officieux)

"Oui ! Mais ! Pour baiser la Marie Coco,

 Il faut avoir, il faut avoir

 Pour baiser la Marie Coco,

 Il faut avoir un gros poireau."

  

Fin juillet 1943, les premiers Vickers-Armstrongs Wellington arrivent à Dakar, afin de remplacer les avions des escadrilles 1BR et 5BR (Les derniers Martin 167 sont reversés à l’école du personnel volant d’Agadir).

La flottille, comme précédemment comporte deux escadrilles, la 1B et la 5B, commandées respectivement par les LV Charles VAZIAGA et CAILLAUD. Cette configuration perdurera jusqu’au 1er août 1944, et à cette date, la flottille 2FB ne formera plus qu’une seule et même formation, commandée par le CC Michel FERRAN jusqu’en septembre 1945.

 

Présentation du Vickers Wellington :

Le bombardier bimoteur de construction britannique, surnommé familièrement « Wimpey » ou « Strickleback » a été produit à plus de 11 000 exemplaires. Plusieurs versions ont été réalisées, et la flottille 2FB en a utilisé 4 différentes : Mk.X, GR Mk.X1, GR Mk.XIII et GR Mk.XIV.

Les moteurs sont du type Bristol Hercules (soit 1310, 1615, 1665 ou 1735 CV au décollage).

Longueur de l’appareil : 19,68 m – Envergure : 26,26 m – Masse à vide : 10 500 kg – Masse maxi : 15 600 kg.

 

 

Les missions :

Après le débarquement allié en Afrique du Nord le 8 novembre 1942 et l’accord le 7 décembre entre l’Amiral DARLAN, le Général américain EISENHOWER et le gouverneur de l’AOF BOISSON, les ports, bases aériennes et flottes sont mis à la disposition des Alliés (L’Afrique du Nord est du domaine américain, et l’AOF  du domaine britannique). C’est ainsi qu’à Ouakam-Dakar, la 2FB rééquipée en Wellington est intégrée au Coastal Command sous la dénomination de « 344 squadron » au sein du 295° wing (dans lequel est aussi intégrée la 7FE à Bel-Air sous la dénomination de « 343 Squadron »). La mission qui lui est impartie est celle d’escorte de convois alliés, afin de lutter contre la menace que font peser les U-Boote tout au long des côtes d’Afrique.

Nous ne détaillerons pas ici toutes ces missions, mais nous en retiendrons qu’une seule :

Le 18 août 1943, un Wellington (Commandant de bord EV1 Bigo, pilotes PM Chevanton et Mtre Chabaud) repère un sous-marin allemand faisant surface. Les pilotes, amorcent alors une attaque, piquent sur le submersible qui aussitôt commence à plonger. Six grenades Mk.XI sont alors larguées et peu de temps après, une vaste tache d’huile d’un km de long sur 500 mètres de large apparaît avec des bulles d’air ainsi que de nombreux débris. Après enquête des Alliés, la destruction de l’U-403 sera confirmée en janvier 1944.

Divers accidents plus ou moins graves, vont se produite sur Wellington. Voici les plus dramatiques :

- 6 novembre 1943 : Un appareil (n° 13), en essais au dessus de Ouakam, suite à une panne hydraulique d’hélice, est obligé d’amerrir dans le port de Dakar où il coule. 2 blessés parmi l’équipage.

- 24 novembre 1943 : le Wellington n° 22 piloté par le PM Cautres, lors d’un exercice percute la mer suite à une erreur de pilotage (2 morts et le restant de l’équipage grièvement blessé).

- 19 décembre 1943 :  Lors d’un vol retour suite à des conditions météorologiques déplorables, l’aéronef n° 14, percute la mer suite à une panne moteur, et explose (perte de tout l’équipage :  EV CERINI, Aspirant PUCHOL, PM MICHEL, SM CRESTEL, QM AQUADRO, QM DUCLOS et QM PATUREAU).

- 2 février 1944 un appareil de la 5B, des suites également d’une panne moteur, percute à son tour la mer en entraînant la mort de tout son équipage (LV DURANDO, EV CARTIER-BRESSON, Mtre NIEL, Mtre ROY, SM VARY, QM ARROUES, QM LE POITTEVIN).

- 23 août 1943 lors d’une mission de protection de convoi, entre Dakar et Port-Etienne, tout l’équipage (EV CUNIN, OE2 PRAT, Aspirant MARTIN, Mtre RAPP, SM RICHAUDEAU, QM BASTIEN et QM MIZANT) disparaît en mer, et les secours dépêchés sur les lieux présumés de l’accident, ne retrouvent ni épave de l’aéronef ni aucun corps.

 

Signalons avant de terminer ce petit chapitre consacré à la 2FB, que la dernière mission de guerre opérée par la flottille se déroulera le 25 mai 1945. Du 2 août 1943 à cette date du 25 mai,, les équipages ont effectué près de 850 missions de guerre en 5000 heures de vol.

Citation à l’ordre du corps d’armée :

« La 2ème flottille de bombardement de l’Aéronautique navale, basée à Dakar, dont le personnel a, dans des conditions très pénibles, assuré avec courage et abnégation, l’exploration au large, la protection des Alliés, la recherche et l’attaque des sous-marins ennemis….. »

Pour ces faits de guerre, la 2FB reçoit la croix de guerre 39-45 avec étoile de vermeil.

 

Nota personnel du rédacteur : Ayant été affecté à la flottille 23F (ex 2F) dès 1960, je ne m’étais pas trop interrogé lors des diverses cérémonies, de la signification  du fanion de la flottille qui comportait à l’époque la mention 2F ainsi que la présence de la décoration accrochée à ce fanion…. Ce n’est que bien plus tard que je l’ai appris !

 

 

 

Flottille 7FE

 

Présentation du Short Sunderland :

Surnommé « Fliegende Stachelschwein » (porc-épic volant) par les Allemands, cet amphibie entre en service opérationnel en 1938 au Royaume Uni, et quand éclate la guerre il est immédiatement engagé dans des missions de lutte anti-sous-marine, rôle qu’il conserve jusqu’en 1945. Produit à  749 exemplaires (en diverses versions), il sert en Grande Bretagne,  Australie, Canada, Afrique du Sud, Nouvelle Zélande et France. Cette dernière en percevra 54 exemplaires, entre 1943 et 1951.

Les premières versions (I, II et III) sont motorisées par des Bristol Pegasus de 1065 CV.

La version versée en 1943 à la flottille 7FE est du type "V".

D’une envergure de 34, 37 m pour une longueur de 26,11 m, le modèle "V" est motorisé par 4 Pratt et Whitney de 1300 CV pour chacun d’eux. Pouvant transporter 900 kg de bombes ou de charges ASM, il vole à la vitesse de croisière de 280 Km/heure, et peut parcourir 4500 km. L’équipage est composé de 13 hommes et l’armement est constitué par deux tourelles quadruples et par deux mitrailleuses lourdes en sabords.

Voici ci-dessous trois vues de cet appareil sous couleurs françaises d’après guerre.

 

  

 

 

 

Les missions :

Faute de renseignements suffisants, nous ne pouvons fournir ici qu'un historique assez peu détaillé de la flottille durant la période 1943-1945.

Composée jusqu’en août 1944 des escadrilles 3E et 4E, et basée à Dakar Bel-Air, elle assure avec les appareils dont elle est dotée, à compter de juillet 1943, la couverture des convois transitant entre Barthurst et les  îles Canaries, ainsi que la lutte anti-sous-marine. Opérant jusqu’en novembre 1945 au sein du Coastal Command, elle est désignée sous l’appellation britannique de « 343 Squadron ».

Elle est commandée tout d’abord par le CC Julien FOURNIER. Après avoir assuré ce commandement jusqu’en décembre 1944, le CC Guy BRARD  succède à ce dernier jusqu’en Janvier 1946.

Un très grave accident est à signaler le 19 septembre 1943 : Au cours d’une patrouille anti-sous-marine, un aéronef de la flottille disparaît au large de Port-Etienne, avec ses 13 membres d’équipage.

 

 

 

Flottilles 3FB et 4FB

 

Le Douglas SBD-5 Dauntless :

L’un des meilleurs bombardiers en piqué durant la seconde guerre mondiale, cet appareil est entré en service sur les P.A de l’US Navy début 1941, en version SBD3 ou A.24.  Le SBD.4 sort des chaînes Douglas à Tulsa (Oklahoma). Le 1er SBD.5 sort d’usine en février 1943.

Le SBD a conquis ses titres de gloire tout d’abord dans la bataille de la mer de corail en mai 1942, ensuite lors de la bataille de Midway en juin 1942, la bataille des Salomon orientales en août 1942, la bataille de Santa Cruz en octobre 1942 et enfin la bataille des Mariannes en juin 1944.

En 1944, les flottilles 3FB et 4FB, ont été constituées et équipées avec ceux du type SBD.5 et sont devenues opérationnelles en septembre.

Monoplan à ailes cantilever, motorisé avec un Wright de 1200 Hp, le biplace SBD.5 avait une envergure de 12, 65 mètres, une longueur de 9,91 et une masse à vide de 3018 kg pour 4700 kg en charge maxi. Vitesse 368  km/h au niveau de la mer, 407 à 5000 mètres. Plafond 8200 mètres, distance franchissable 2100 km.

 

 

 

Historique des 2 flottilles jusqu’en 1945 :

Dénommées VFB.1 et VFB.2 (Vely French bombing) par les Américains, les flottilles 3FB et 4FB qui viennent d’abandonner les Martin 167F, sont rééquipées en SBD.5 à Agadir et sont opérationnelles en septembre 1944. A cette échéance, elles quittent Agadir et stationnent à Port-Lyautey. La 3FB est commandée par le LV Félix ORTOLAN (jusqu’au 1er mai 1945), et la 4FB par le LV Raymond BÉHIC (jusqu’en juillet 1945).

 

Le 5 novembre 1944, les 2 formations sont libérées de la tutelle américaine (Fleet Air Wing 15) et passent sous contrôle permanent français. Toutes deux forment alors le groupement aéronaval n° 2 (GAN.2) et quittent Port-Lyautey pour Cognac (terrain de Chateaubernard) le 23 novembre. Les 24 appareils arriveront le 26 novembre.

Rattaché aux forces aériennes de l’Atlantique sous les ordres du Général CORNIGLION-MOLINIER, le GAN.2 participe aux opérations à partir de la dite ville de Cognac jusqu’au 8 mai 1945 (réduction des poches allemandes de l’Atlantique dont nous allons parler ci dessous).

 

 

Au moment du repli général des forces allemandes, celles-ci avaient constitué dans le Sud-Ouest, trois poches de résistance : autour de La Pallice, Royan et la pointe de Grave. Environ 50 000 Allemands constituent une force particulièrement entraînée et armée, dont 30 000 sont à La Rochelle, 15 000 dans la zone de Royan et 1500 dans la pointe de Grave. Pour ouvrir le verrou qui fermait l’estuaire de la Gironde, le commandement avait décidé d’entreprendre une action de grande envergure avec l’appui d’éléments blindés du front d’Allemagne. L’opération devait alors lieu en décembre 1944 avec l’appui de la « First Tactical Air Force » dont le GAN.2 constituerait l’échelon avancé. La brutale offensive allemande des Ardennes mit fin à ce projet, l’opération remise à une date ultérieure et le général de Larminat reçut l’ordre de contenir les Allemands dans les poches sans chercher à les déloger. C’est à ces opérations d’usure ainsi qu’à la surveillance maritime que les SBD de la 3F et 4F furent employés.

 

Au cours du mois de décembre, nos SBS entrent en action, bombardant le fort de Lussac, les retranchements du Verdon, la pointe Vallières et le blockhaus de Fontebeau. 70 tonnes de bombes sont alors lancées au cours de 165 sorties et 19 appareils sont touchés par la DCA. Un seul d’entre eux, incendié doit se poser en campagne sans accident de personnel.

En janvier 1945, l’action est encore plus intense. A deux reprises les SBD exécutent leurs piqués sur des bateaux, cargos chargés de troupes essayant de s’enfuir, ou pétroliers mouillés à La Goubre. La réaction ennemie est vive, un appareil* est perdu corps et bien, un autre rentre de justesse et doit atterrir train rentré.

*Six SBD devaient bombarder un pétrolier au large de la pointe de la Coubre. L’OE Paul Goffeny pilotait l’avion de tête. Son équipier le PM Bouchereau s’aperçut après l’action, que la bombe de l’avion  de Goffeny, était restée accrochée. Quelques secondes après, la dite bombe explosa et l’avion s’écrasa en flammes dans un bois au sud de la Tremblade. Les corps des OE Goffeny et QM Chauvin furent recueillis par les Allemands qui les enterrèrent dans le cimetière de l’église de Royan, avec les honneurs militaires.

 

Le mauvais temps réduit l’activité en février, mais les six derniers jours du mois sont marqués par des attaques contre des dépôts de munitions qui sautent et des baraquements incendiés.

En mars, la ronde continue avec encore la perte d’un appareil, dont l’équipage arrive à se dégager dans les lignes amies. Les straffings amenuisent un peu la DCA ennemie, qui devient un peu moins meurtrière, et les 2 flottilles sont prêtes pour l’assaut qui se prépare.

 

Au mois d’avril, la Flank Force française commandée par l’Amiral RUE qui a arboré sa marque sur le cuirassé LORRAINE, entreprend le blocus des côtes pour éviter une évasion massive des troupes allemandes encerclées vers l'Espagne. Les SBD participent à ces opérations avec les navires. Véritable travail aéronaval, les équipages redoublent d’ardeur. Un chalutier armé par les Allemands, qui tente de sortir est immédiatement bombardé, mitraillé et coulé en quelques minutes. Les missions de bombardement sur les ouvrages fortifiés reprennent ensuite avec intensité. Malgré la DCA très violente, les SBD vont s’acharner sur les abris bétonnés de Montalivet et Fondebeau qui ont résisté jusqu’ici à tous les assauts. Un accrochage en vol au cours d’un piqué entre deux appareils provoqué par une avarie de volets, se termine miraculeusement sans catastrophe (L’appareil du LV RABINEAU ayant rattrapé dans le piqué l’appareil du PM DIDON).

La liste des pertes eut été close sans l’apparition d’un engin de défense inusité, sorte de fusée antiaérienne, genre « Orgue de Staline » (le Nebelwerter) qui incendie en vol un appareil. On retrouvera quelques jours plus tard, les corps de l’équipage dans la forêt de La Palmyre.

 

Le 15 avril, la Flank Force approche de la pointe de Grave et bombarde les ouvrages avec les grosses pièces de la Lorraine et du Duquesne. Les SBD se relaient alors pour neutraliser les batteries allemandes.

Il ne reste plus qu'à réduire des ouvrages isolés et l’île d’Oléron dont la garnison résiste encore. Le 30 avril, le dernier acte se joue dans l’île. Protégé par les SBD, le débarquement s’effectue sans peine et après 2 jours de combats la garnison allemande se rend. A La Pallice, des pourparlers fructueux sont alors en cours avec l’amiral allemand chargé de la défense du secteur Sud-Ouest et les ouvrages isolés se rendent les uns après les autres. Les Allemands déposent les armes le 30 avril, et la garnison d’Oléron se rend le 2 mai.

Au terme de ces combats le GAN.2 aura perdu 4 équipages, et 8 des ses appareils auront été détruits.

Liste des équipages perdus :

- Le 1er janvier 1945 : OE pilote GOFFENY et QM radio CHAUVIN - (de la 4FB)

- Le 18 février 1945  : PM pilote GÉROLD et QM radio GUÉNAEN - (de la 4FB)

- Le 22 février 1945  : SM pilote ABGRALL et QM radio HAGUE - (de la 3FB)

- Le 16 avril 1945     : Mtre pilote BONNEFOY et SM mitrailleur BATAILLE - (de la 3FB)

 

Le 27 mai 1945, les deux flottilles sont affectées sur la BAN d’Hyères, où l’entrainement du temps de paix reprend. Elles seront par la suite, directement mêlées aux durs combats en Indochine.

 

 

 

Flottille 6FE

 

Nous avons lu dans le chapitre consacré aux FNFL, la genèse de cette flottille, désignée sous le sigle américain : VFP-1.

Affectée sur le sol marocain et implantée à Agadir, sa mission est d’assurer la couverture des convois ainsi que les patrouilles (Détroit de Gibraltar et Canaries). Un détachement de ses appareils, tout comme ceux de la 8FE, est affecté en Corse à partir du dernier trimestre de l’année 1944.

Le 23 juin 1944, l’un de ses appareils s’écrase en mer (2 survivants parmi les 7 membres d’équipage).

Un autre accident survient le 12 juillet devant Safi. Dans un banc de brouillard, l’appareil dont le chef de bord est le LV JACQUEMIN se brise en deux lors d’une tentative d’amerrissage : 5 morts sur les 9 membres d'équipage.

Durant le mois d’août, le LV Patrice DECAIX, est désigné comme successeur du LV de LÉVIS-MIREPOIX. Il assurera ce commandement jusqu’en janvier 1945. Le commandement américain, pour certaines raisons que nous n’exposerons pas ici, parvient à l’évincer et il est remplacé  peu après par le LV Maxime ARNAULT de LA MÉNARDIÈRE.

A partir du mois de septembre 1944 le personnel est en instruction,  la flottille devant être rééquipée en PV.1 Ventura. Ce rééquipement, due aux exigences de tactiques de combat américaines, est terminé en décembre de cette année, les derniers Catalina étant reversés à une section de servitude d’Agadir.

Avec ce nouveau type d’appareil non amphibie, la 6FE poursuit les mêmes missions vues précédemment avec les Catalina.

 

 

Le PV1 Ventura :

Propulsé par deux moteurs Pratt et Whitney de 1850 à 2000 CV selon les versions, les Ventura sont entrés en service en Grande-Bretagne en 1942. Les Américains s’en dotent (B34 pour l’USAF et PV.1 pour l’USN) et ce seront eux qui nous en délivreront près d’une quarantaine (le 1er lot se chiffrera au nombre de 14 à la date du 16 novembre 1944).

Son armement comportait quatre ou six mitrailleuses de 12,7 mm  deux de 7,7 mm et il pouvait emporter 1300 kg de charge.

D’une longueur de 15, 67 m pour une envergure de 19,96 m, il pesait 7800 kg à vide et 12300 kg à pleine charge. Vitesse maxi 500 km/heure, distance franchissable 1500 km.

 

 

 

 

Flottille 8FE

 

Devise : "Ad Lucem"

La deuxième unité équipée en hydravions Catalina est la 8FE, qui reprend les traditions et insigne de l’ex escadrille 3E1. Suite à un accord entre Américains et Français, du personnel en provenance d’Afrique du nord est envoyé à Norfolk en juin 1944 et prend en compte 7 de ces appareils, puis 8 autres en août.

Après les entraînements effectués à Breezy Point et Bocca Chica, la flottille rallie le Maroc en transitant tout comme la 6FE par le Brésil et Ascension. L’arrivée du 1er détachement (7 appareils) s’effectue le 8 septembre à Agadir et la flottille est au complet en novembre, sous les ordres du CC Henri PACAUD.

Sous commandement américain, elle porte la désignation de VFP-2 et se partage alors en divers détachements. Dès septembre, 3 appareils sont à pied d’œuvre à Ajaccio, puis d’autres sont affectés à la recherche des mines à partir de Cuers, de la Sicile et même de Grèce. En novembre 2 de ses Catalina sont détachés pour les opérations autour des poches allemandes de Royan et de l’île d’Oléron.

Pendant ce temps, au Maroc, les 8 autres appareils assurent les patrouilles maritimes à partir d’Agadir ou de Port-Lyautey.

A la fin du mois de mai 1945, la flottille totalise 539 missions en 4500 heures de vol.

Un peu plus tard et en octobre, 4 de ses Catalina rejoignent Saïgon et nous retrouverons la formation au complet dans un prochain chapitre consacré à la guerre d’Indochine.